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Le Laos en bouche

Notre découverte du Laos est passée évidemment aussi par les papilles et les senteurs de la cuisine locale. Celle-ci a su nous ravir, nous étonner et nous décontenancer selon les mets qui ont croisé notre route. Petit aperçu des surprises et merveilles de la gastronomie laotienne.

Des boissons pour rafraîchir la tête ou bruler les entrailles

Voici le top 4 des liquides enchanteurs. Et en première place le fameux fruit-shake, peut-être pas une spécialité locale mais sans aucun doute un pilier indétrônable. Il est présent partout, des restaurants aux marchés, bu par tous et déclinable à l’envi selon le fruit ou le mélange de fruits choisis, la présence de lait concentré ou non et autres subtilités m’ayant échappé. Excellents mango shake, étrange dragon-fruit shake pailleté de noir et abominable durian shake qui m’a toutefois permis de répondre à une question me taraudant depuis Singapour : comment un fruit à l’odeur si pestilentielle peut-il ravir les papilles ? Bien que ce fruit soit très apprécié par les laotiens entre autres, mon humble avis est que le fruit a le goût de son parfum et le shake en question a donné à ma langue l’impression d’avoir lapé le sol humide et nauséabond d’un marché section viandes.

Lao lao et beerlao se tirent la couverture pour être la boisson nationale. C’est bien simple, on peut être dans un trou paumé, s’il n’y a que deux choses dans le commerce ce seront celles-là. L’une rafraichit là où l’autre brule l’intérieur et décape les entrailles mais toutes deux, quoiqu’à des rythmes différents, enivrent, ce qui tient autant de la teneur en alcool que de la manière de les consommer : verre collectif qu’il faut vider cul sec avant de le passer au voisin (heureusement la taille du godet est inversement proportionnelle à la teneur en alcool de l’élixir bu). Petit truc quand vous êtes en bonne compagnie mais que vous approchez de vos limites, sachant que refuser le verre tendu n’est pas une option, pas plus que rouler sous la table : avant de passer le verre il faut en vider les dernières gouttes au sol afin de tendre un récipient « neuf » au voisin, il est alors possible d’en renverser un peu plus que prévu. Exécutée avec beaucoup de naturel cette petite parade passe inaperçue et peut permettre d’éviter le coma éthylique, surtout quand le lao lao est consommé avant le petit-déjeuner (comme chez les Akhas, politesse envers les invités). Il existe autant de lao lao que de village voire de famille en produisant aussi mon avis est-il partagé entre tord-boyaux ou alcool de riz sympathique.

Le café enfin mérite une place au tableau d’honneur quoique tout le monde ne sache pas toujours très bien comment il se prépare et quoiqu’il se résume souvent à une dosette de Nescafé même dans un village de producteurs du plateau des Boloven. C’est bien simple, il est moins bu pour son goût que pour s’envoyer une petite décharge au réveil histoire de quitter définitivement Morphée. D’ailleurs il est toujours servi avec du thé pour immédiatement en « laver » le goût. Mais le café des Boloven est un délice et une étape incontournable pour les amateurs (et pour simplifier « café » se dit « kafé » en lao).

Petits plaisirs gustatifs et grands incontournables

Au Laos on ne peut pas manquer la baguette, omniprésente, et presque aussi populaire que la noodle soup pour le petit déjeuner, qu’elle soit badigeonnée de vache-qui-rit ou servie avec une sorte de pâté local. Quant à la noodle soup, épine dorsale culinaire du voyage, elle est délicieuse, bon marché et nourrissante. Si l’on est vraiment malchanceux elle sera à base de nouilles instantanées chinoises mais la vraie est réalisée avec des pates de riz vendues sur le marché.

Immanquable aussi le sticky rice ou riz gluant. Cœur de tous les repas, il remplace aussi notre morceau de pain lorsque la boulette de riz vient se tremper dans les sauces et plats proposés. Ses vertus curatives sont impressionnantes en cas de gastro ou d’abus de lao lao. En dessert cuit dans du lait de coco et servi avec des morceaux de mangue c’est un régal.

Au top de notre sélection de recettes :

  • La lao salade à base de salade verte, de vinaigrette et de cacahuètes
  • Le laap, salade populaire à base de viandes émincées, de riz, de menthe et autres saveurs non identifiées
  • Toute soupe au lait de coco, saveur parfumée et exotique
  • Les algues du Mékong servies sous forme de cracker croustillant et souvent agrémentées de sésame
  • Le poisson à la citronnelle des petites gargotes installées le long du Mékong à Vientiane
  • Les poissons frits de Mama Kem des parties de pêche de Ban Na
  • Le Tom Yam, soupe parfumée d’épices et de racines odorantes
  • Toutes les épices dont les noms et les mélanges nous ont échappé et qui se marient si bien pour relever les plats et leur donner une saveur unique
  • Les nouilles et le riz frits, autant de déclinaisons du pad thai thailandais
  • Les fruits bizarres aux apparences, textures et saveurs inconnues et délicieuses

Et pour les carnivores…

Fred, cobaye de cette rubrique, ne s’est pas toujours montré téméraire. Il faut dire que les laotiens mangent toutes les parties de tout et parfois d’on-ne-sait-quoi…

Fred a ainsi délaissé les pattes de poules barbecue et la soupe de rats (il s’est contenté d’une cuillère du bouillon), ainsi que les criquets et les scarabées en brochettes.

Il s’est laissé tenter par la peau de buffle vendue en bâtonnets à sucer notamment (« spécial »), le sang de canard servi par Mama Kem et dans lequel il fallait tremper sa boulette de sticky rice (« no comment », le cobaye n’en a pas de souvenir, il était sous l’emprise du lao lao), et la viande de buffle hachée en sauce (« pas un souvenir impérissable »).

Nous verrons à l’occasion des animaux que nous aurons du mal à identifier et à imaginer dans des assiettes sans que l’opportunité de les goûter ne se présente pour Fred et c’est peut-être tant mieux. Comme ces écureuils accrochés devant une maison qui auront fait piler un bus et descendre en courant la moitié de ces passagers se ruant pour aller en acheter avant de remonter dans le bus, tenant les charognes par les pieds. Et comme ces espèces de taupes aussi, pesées puis vendues vivantes qui se griffaient et s’entaillaient à grands renforts de cris. Et comme cet autre animal dépecé et pendu à un arbre et que j’ai pu/du observer pendant toute une journée, le guide du trek ayant décidé de l’acheter et de le ramener pour le souper du soir, et qu’il a fallu se trimbaler sous le cagnard, espèce d’énorme rat de la taille d’un chien.

Délicieuse et/ou surprenante, la cuisine laotienne est à elle seule un voyage…

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