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Good-bye Laos

La larme à l’œil et la fleur au sac à dos nous grimpons dans le bus qui nous mènera à Phnom Penh ; notre fil conducteur sera le Mékong que nous suivrons jusqu’à la capitale cambodgienne en laissant derrière nous le royaume du million d’éléphants et du parasol blanc. Durant 2 mois il n’a cessé de nous enchanter d’aventures en découvertes, de rencontres en paysages et pourtant il y a encore tellement de choses à voir et à faire… A l’heure du départ qui sonne toujours un peu comme celle du bilan ressurgissent tous ces gens croisés, tous ces lieux fabuleux et tous ces sourires d’enfants ; des liens imperceptiblement se sont noués et ils nous semblent indéfectibles : le Laos nous a touchés au cœur. Ce sont aussi toutes ces femmes que nous avons vues, aperçues, saluées, croisées, connues, rencontrées qui défilent dans/devant mes yeux et c’est à elles que je dédicace ces quelques lignes, bref hommage de papier (ou de pixels). Alors voilà…

A toutes ces femmes chaleureuses qui nous ont souri, cajolés, bichonnés et nourris. Qui ont veillé presque maternellement sur nous et notre panse (et notre foie). Douces, accueillantes, pilier du foyer et pourtant si souvent en retrait, silencieuses, un peu cachées comme dans tous ces villages où elles ne partageaient pas le repas mais apparaissaient toujours au moment propice pour remplir les plats, servir le thé, débarrasser la table, veillant dans l’ombre au bien-être de leurs hommes (mari et fils, seules les katu pratiquent la polyandrie) et de leurs invités.

…ouvrières de l’ombre me semble-t-il parfois, elles m’apparaissent fortes et solides, portant leur foyer de l’aube au coucher et effectuant mille et uns travaux quotidiens. Maîtresses de famille (de fait mais non de titre), garantes des distributions de tendresse et de nourriture, les revoilà pilonnant le riz, accroupies dans les rizières, défrichant les zones brûlées, travaillant aux côtés des hommes dans les usines, distillant le lao lao, pêchant dans la rivière, lavant le linge, levant le coude, tissant sous la maison, cousant devant la porte, marchandant dans leur échoppe, bébés dans les bras, sur le dos, sur le ventre, portant l’eau ou le bois dans des paniers plus lourds qu’elles. Ont-elles la reconnaissance qu’elles méritent, elles qui n’ont pas la moitié des droits des hommes ?

…elles sont belles aussi et coquettes, souvent totalement couvertes pour ne pas foncer avec le soleil, gants de laine et col roulé par 40°c quand l’homme est torse nu (la couleur de sa peau ne doit pas être un problème !). Leurs cheveux, objets d’un soin tout particulier, le plus souvent portés très longs sont superbes,longuement lavés et brossés, scènes de rivières ou de villages. Le jour ils sont parés de barrettes pailletées, de chouchous, de pinces.

Quant elles ne portent pas une tenue traditionnelle de leur ethnie, brodée ou tissée, sombre ou colorée, sertie de bijoux ou de pompons, ou des vêtements plus « modernes » surtout en ville, les laotiennes portent majoritairement le sin (jupe portefeuille traditionnelle) qui se change facilement en sarong pour se baigner et se laver dans les villages. En soie, en coton, artisanal ou industriel, il est partout et dessine des silhouettes tout en longueur.

Et je n’oublie pas leurs ongles fabuleux ! La manucure prend ici une autre dimension : ongles longs et vernis mais point d’aplats unis trop fades, ici le vernissage des ongles est un art. Ceux-ci sont pailletés, bicolores, tricolores, quadrillés, support de dessins complexes (une jeune fille avait une rose sur chaque ongle) et de créations en tout genre. Une idée à ramener ?

Les femmes sont des magiciennes enfin, un peu ensorceleuses quand elles sourient ou distribuent la boisson enivrante, fascinantes quand elles répètent les gestes si anciens et si complexes du tissage, sorcières quand elles manipulent les ingrédients qu’elles ont préparés pour concocter une mixture savoureuse. Dépositaires de recettes, de secrets, de traditions, de savoirs…

Voici l’image que j’emporte de ces femmes, elles méritaient bien quelques lignes juste pour elles. Mais qu’on ne me taxe pas de féministe, en remerciant ces femmes je n’enlève rien aux hommes, je mets juste en lumière celles qui sont un peu trop souvent dans l’ombre peut être.

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