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Phongsali ou le bout du monde

Il nous faudra 20 heures pour rallier Phongsali, capitale provinciale du Nord. Le bus, cahotant et crachotant, chargé de la soute au toit, aura toute la peine du monde à accomplir sa mission.

Y passer la nuit a relevé du défi mais, si nous avons peu dormi, au moins nous sommes-nous amusés de ce trajet pittoresque.

Les places, étroites, ne permettent pas le sommeil car à peine le corps s’affaisse-t-il un peu que les genoux viennent taper sur des barres de fer très dangereuses sur une route cabossée. Les nids de poule et les sursauts du bus nous ont fait souvent littéralement décoller de notre siège et à chaque arrêt c’est des sièges plus loin qu’il a fallu rechercher paires de tongues ou tout autre objet posé au sol. Pour nous bercer des haut-parleurs grésillants ont balancé de la pop lao à pleins tubes durant tout le trajet.

Un peu gênés au début de nous étaler, nous avons finalement opté pour l’attitude générale : s’avachir le plus confortablement possible dans l’espace disponible. L’allée centrale, jonchée de sacs de bois et de cartons, m’a ainsi fourni dossier et coussin pour mes quelques heures de sommeil, entrecoupé par les coups de tête dans les buches que les trous de la route me faisaient donner.

Arrêtés une heure au milieu de nulle part au milieu de la nuit, nous avons assisté au changement, non pas d’une, non pas de deux, mais de trois roues de notre carrosse (ou de notre citrouille ?). De temps en temps, un toc-toc à la fenêtre : le passager concerné pousse le carreau et nous voyons quelqu’un rentrer dans le bus, se faufilant agilement depuis le toit (c’est arrivé tellement de fois que nous nous sommes demandés combien y passaient leur nuit !). Un carreau qui s’ouvre sans toc-toc c’est un glaviau qui se perd dans la nuit, accompagné du gros raclement de gorge caractéristique ; hommes, femmes, enfants, tout le monde s’y met et ca crachote à gogo.

Vers 12h00 le lendemain nous rallions enfin Phôngsali mais il nous semble bien plutôt que c’est le bout du monde ! Nos corps sont courbaturés et boxés, endoloris et raides, mais nous voilà dans une des régions les plus reculées du Laos.

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