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Dans les rues de Yogyakarta

Dans les rues de Yogyakarta

Premières impressions

Yogyakarta est, paraît-il, l’âme de Java, son cœur artistique et culturel, où cohabitent modernité et tradition. C’est également la dernière cité à posséder un sultan, intégré à l’organigramme politique du pays en qualité de gouverneur (fonction héréditaire comme l’est le titre). Quoique curieux de découvrir ce centre du batik -entre autres choses- nous avons finalement surtout considéré cette ville comme une étape, un lieu de transit, là où nous allions louer des motos. Nous ne lui avons consacré que quelques petites journées de déambulations; une aire de repos en somme !

Dans les rues marchandes de YogyakartaIl faut dire que nous nous y retrouvons épuisés par des nuits de train en mode sardine ou déphasés d’avoir longuement roulé en moto après avoir nuitamment couru levers de soleil et cratères fumants. En conséquence nous identifions la ville -bien malgré elle- à des réveils difficiles, à un sommeil pesant, paralysant, qui tarde à s’envoler. Levers d’autant plus brutaux que nous avons posé nos sacs à côté d’une artère à shopping-souvenirs. Accéder au centre relève de l’épreuve de force ; il faut traverser des centaines de stands vendant tous les mêmes objets, en déclinant 1000 et une propositions de becaks (cyclo-pousse) et en répondant automatiquement aux « où allez-vous ? », « d’où venez-vous ? » qui fusent de toutes parts. C’est un art – celui du funambule – qu’il s’agit d’acquérir. Accorder de l’attention à la voix qui questionne tout en étant décidé, en apparence en tout cas, et en continuant de marcher.

Une Yogya au charme suranné…

Detail du Kraton de Yogya

Voilà le kraton, le centre de la ville (et de la vie de la ville?), le palais du sultan. Un long corridor de boutiques permet d’en trouver aisément – mais pas sans encombre – l’entrée. Nous déambulons dans de grandes cours. Un kiosque à musique, une terrasse de réception, une calèche… Et juste à côté de massives portes closes qui gardent privés les espaces dévolus au sultan et à sa famille. Je me dis qu’elles contiennent aussi la vie bien à l’abri. Parce que dans les espaces laissés à notre découverte, elle a fichu le camp.Palais Kraton à Yogyakarta Ils sont vides et comme désincarnés ; un grand musée où les gardes nous frôlent comme des ombres. Succession de salles commémoratives. Les batiks de la famille royale. Un « musée » dédié à Sri Senko Hamengku IX, de l’automobile miniature de l’enfance aux maniques de cuisine. Des étagères où s’entassent des présents de toute l’Europe, défraîchis, surannés, démodés, poussiéreux. Sensation d’être dans un espace tout entier mis sous verre, en vitrine, sans âme, patiné, hors du temps… où les gardes en tenue traditionnelle, kriss à la ceinture, seraient des automates aux mouvements réglés par les aiguilles d’une horloge invisible.

Vitrine aussi cet atelier de batiks que nous visitons. Tout y est pédagogiquement bien expliqué mais les deux travailleuses à l’œuvre nous apparaissent comme des mannequins faisant office de figurantes à côté de la boutique. L’âme et l’art du batik nous les trouverons hors de la ville plus tard.

Mais une ville bien vivante !

Rue et graffiti à Yogyakarta

Une autre Yogya s’offre à nous ailleurs.

Dans un petit quartier coloré, débordant de plantes et de fleurs, dans les ruelles duquel les enfants nous suivent en troupeau jacassant tandis que les habitants s’amusent à nous voir passer.

La légiste :/

Une femme nous invite à prendre le thé dans sa maison et nous parle dans un anglais impeccable et avec passion de son métier de médecin légiste, avant de bourrer nos sacs de gâteaux. Simplicité des rencontres…

Sur les murs de la ville, où s’étale avec profusion et force couleurs une culture vivante qui se cherche de nouveaux supports à coups de bombes de peinture…

Dans l’ubuesque circulation routière aussi, au sein de laquelle nous tentons de nous fondre, de frayer notre chemin à 2 roues, en suivant au mieux le flot et l’absence de règles…

Dans les warungs qui servent des soupes brûlantes ou des brochettes à la sauce cacahuète dans le brouhaha des conversations et de la musique jouée par de nombreux pousseurs de chansonnette qui tendent le chapeau…

Wayang Kulit

Théâtre d'ombre Wayang Kulit

Nous assistons un soir au musée à un spectacle de wayang kulit (théâtre d’ombre). La version raccourcie pour touristes. Spectacle d’une nuit ramené en deux heures. Pour une quinzaines de personnes derrière l’écran (joueurs de gamelan et marionnettiste) nous sommes 7 spectateurs. Visuellement le spectacle est superbe, magie des ombres des gracieuses marionnettes en dentelles de cuir.
Théâtre d'ombre Wayang KulitMais pour nous la magie en restera là… Et pourtant nous étions tout prêts à nous émerveiller de tout, chauffés d’avance par notre envie de découvrir cet art millénaire. Nous n’arrivons pourtant pas à accrocher à l’histoire à laquelle nous ne comprenons goutte.
Qui sont les personnages ?
Que se passe-t-il ?
Mais qui parle (toutes les voix sont identiques et le personnage parlant n’est pas forcément en mouvement).
Finalement l’action se passe derrière l’écran – les spectateurs sont libres d’aller et venir à leur guise côté ombres ou côté couleurs et orchestre – où les joueurs de musique papotent bruyamment, font des va-et-vient, dînent !

Une expérience – je l’avoue honteusement – qui nous a donné l’impression de passer à côté de quelque chose. Un rendez-vous manqué. Heureusement le wayang kulit n’est pas rancunier… Nous aurons d’autres occasions et d’autres moyens d’aller à sa rencontre…

BBQ de satay mobileWeshRepos du guerrier becakSmileBicycletteEn prenant racineSave the treesLe maitre du Wayang KulitWayang KulitMusicien de l'orchestre du gamelan

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